« L’école permet de maintenir un semblant de normalité face à l’annonce de la maladie » Françoise Bourguignon, enseignante pour les adolescents et jeunes adultes

Venir en aide aux jeunes en parcours chaotique et les empêcher de décrocher est le but de son métier. Françoise Bourguignon, est professeur de Mathématiques et enseignante à l’IHOPe depuis 5 ans.
COMMENT SE MET EN PLACE LE SUIVI SCOLAIRE ?
Le médecin, lors de la première consultation évoque la scolarité avec la famille en disant que cela fait partie prenante des soins.
Notre démarche est simple : nous demandons bien évidemment si nous pouvons appeler l’établissement d’origine du patient. Dans un second temps, nous contactons l’établissement scolaire après avoir pris des renseignements auprès du jeune et de la famille (renseignements administratifs, parcours scolaire…). Notre objectif est d’être en contact avec le chef de l’établissement ou son adjoint. L’idée est de correspondre avec chacun de nos collèges pour chaque matières (mathématiques, français, anglais). Ce n’est pas toujours simple de les joindre donc nous passons beaucoup par emails. De plus, depuis quelques années, les élèves ont un cahier de texte en ligne, donc nous profitons de cela aussi !
Tout au long de l’hospitalisation, on ré-interroge l’établissement quand nous avons besoin. Lorsqu’un élève doit passer un examen, par exemple, nous formons des demandes d’aménagement, et nous nous chargeons des démarches administratives lors de l’inscription à l’examen. De plus, nous sommes dans l’échange régulier avec les collègues pour les contenus des cours donnés. Puisque nous intervenons de la 6ème jusqu’au bac, que ce soit lycée professionnel ou général puis pour les études supérieures, cela sera à l’assistante sociale de faire le lien avec la fac ou l’école du patient.
COMMENT CELA SE PASSE CONCRETEMENT AVEC LES PATIENTS ?
Nous ne pouvons pas vraiment savoir à l’avance la fréquence à laquelle nous allons voir le patient puisque lorsque les jeunes viennent à l’hôpital c’est dans un premier temps pour leur cure de chimiothérapie, ils ne sont donc pas forcément en forme tout le temps.
De plus, lorsque que nous rendons visite aux jeunes pour leurs proposer notre accompagnement, il y a des chances qu’un médecin ou un proche du patient soit déjà en sa compagnie donc cela repousse encore notre démarche puisque nous ne sommes présents que 14h par matière par semaine. Nous essayons tout de même à minima de voir les jeunes 1h par matière par semaine, cela correspond à ce que les élèves auraient s’ils faisaient cours à domicile. Cela est effectivement peu mais lors d’un cours d’une heure individuel, nous avançons beaucoup plus vite qu’avec une classe entière.
Pour les cours, il n’y a pas de rendez-vous fixé sauf pour les jeunes en radiothérapie car on essaye d’organiser le cours juste avant la séance, c’est donc un horaire fixe. La salle de classe est bien appropriée pour les cours. En effet, dès que cela est possible pour le patient de se déplacer, nous en profitons. De plus, le fait de se déplacer permet au jeune de sortir de sa chambre et donc de penser à autre chose et puis cela donne ce cadre scolaire que nous n’avons pas dans la chambre. Pour la famille, c’est aussi un bon point car cela leur permet de faire autres choses et de laisser l’enfant avec d’autres personnes, cette certaine distance comme à l’école classique est bénéfique.
La plupart du temps, les cours sont individuels puisque pour faire concorder deux emplois du temps des deux patients, c’est vraiment compliqué !
Ce ne sont pas les mêmes cours qu’en école classique puisque nous ne les voyons pas très souvent, il faut mettre des priorités par rapport au contenu que l’on va traiter et les impératifs (pour les futurs examens). L’avantage est que nous nous mettons à leur niveau, cela permet de revenir en arrière lors de difficultés rencontrées ou d’aller plus vite quand la compréhension est rapide. Nous avons exactement les types d’élèves que nous rencontrons ailleurs et nous pouvons véritablement nous adapter à eux.
PENSEZ-VOUS QUE CET ACCOMPAGNEMENT EST PRIMORDIAL DANS UN HOPITAL, TOUT PARTICULIEREMENT LORSQU’IL PREND EN CHARGE DES JEUNES DE CANCER ?
Le médecin insiste sur le fait que l’école est très importante. Après le traitement, l’objectif est de ressortir sans lacune au niveau de l’école. En effet, la plupart des patients ne veulent pas perdre leur année scolaire ! C’est vrai que souvent lors de l’annonce de la maladie, tout leur tombe sur la tête et le fait de faire classe leur laisse un semblant de normalité qui est important pour le moral.
Nous essayons de maintenir aussi l’école dans le but qu’il n’y ait pas de rupture complète puisque cela arrive malheureusement parfois avec des jeunes déjà fragiles scolairement ou en début d’études (CAP, …).
Nous avons, pour ces parcours un petit peu problématiques, une psychologue de l’éducation nationale et qui vient au Centre Léon Bérard à la demande pour rencontrer les patients et relancer des projets scolaires. Elle n’assure pas le rôle de psychologue au centre puisqu’il y en a déjà ici mais de conseillère d’orientation.
QUE DIRIEZ-VOUS A L’ADOLESCENTE DE 15 ANS QUE VOUS ETIEZ ?
Je dirais qu’il faut bien suivre ce qu’on a envie de faire, se donner les moyens de réussir en faisant les efforts nécessaires et qu’il faut saisir les opportunités qui se créent en milieu de parcours.